Abstract
L’apparition d’une nouvelle spécialité scientifique donne fréquemment lieu à la résistance plus ou moins active de celles et ceux qui ont le sentiment d’être floués par une telle opération. Bien que ces oppositions puissent se justifier par le souhait de conserver le monopole scientifique sur un objet x ou une problématique y (et sur les profits matériels et symboliques qui leur sont associés), elles ont aussi souvent pour origine une incompréhension proprement scientifique. Les tenants de la nouvelle spécialité sont alors accusés par les scientifiques établis de réinventer la roue, d’utiliser un nouveau nom pour une ancienne manière de faire. Ces critiques sont d’autant plus faciles à émettre que l’innovation est souvent le fait des jeunes générations, qui, recevant le soutien de quelques « anciens », se placent alors en opposition à leurs aînés.
Ces phénomènes sont bien documentés en sociologie des sciences, et les facteurs sociaux et cognitifs qui conduisent à l’apparition de nouvelles spécialités le sont tout autant. L’objet de cet article n’est pas de revenir sur cette littérature foisonnante mais de s’intéresser à un problème qui a été assez peu étudié jusqu’à présent : la succession, dans un temps relativement court, de spécialités qui semblent parfois se confondre sur le plan scientifique et qui partagent des acteurs communs. Pour ce faire, nous nous concentrerons sur le cas de la psychologie évolutionniste. On considère généralement que la psychologie évolutionniste est la science du comportement humain historiquement issue du rapprochement de la psychologie expérimentale, des sciences du comportement animal et des sciences cognitives à la fin des années 1980. Elle se distinguerait du reste du champ de la psychologie par la place qu’elle confère dans ses fondements conceptuels à la théorie de l’évolution par la sélection naturelle et sexuelle…
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